lundi 30 novembre 2020

The Lion of Khartoum de White Dog Games


The Lion of Khartoum édité par White Dog Games est un wargame solitaire de Jacques Rabier. Bien qu’acheté il y a quelques mois, je n’ai pu y jouer que récemment, pour des raisons matérielles que j’expliquerai plus bas. Le thème est celui du siège de Khartoum en 1884-1885 par les forces du Mahdi.

Une autre référence de ce jeu pourrait être le  film Karthoum (1966), avec Charlton Heston, que je me souviens parfaitement avoir vu enfant.  L’auteur s’est librement inspiré des faits historiques pour nous livrer ce petit wargame jouable en solitaire. Le but du jeu est simple : résister le plus longtemps et atteindre la fin du 12ème tour, à savoir passer le mois de janvier 1985, pour voir enfin les secours arriver. Khartoum est attaqué par 4 colonnes mahdistes nommées « bannières » et disposant chacune d’un facteur « force » qui évolue tout au long de la partie au gré de nos actions mais aussi des cartes événements.  A chaque tour le joueur dispose d’un nombre d’actions variables, mais sachez que vous garderez toujours le dernier point d’action pour élaborer votre défense. Un tour se termine par le tirage d’une carte « Bannière » qui détermine d’où viendront une ou plusieurs attaques mahdistes.

Dans un premier temps je me méfiais des cartes évènements, tirées en début de tour. J’en attendais beaucoup d’imprévus, pour ne pas dire, de catastrophes. En fait, ces cartes déterminent principalement le nombre de points d’action disponibles et apportent leur touche d’immersion dans l’histoire. La part d’imprévu reste raisonnable. 

Quelques cartes évènements

Les premiers tours consistent avant tout à organiser la résistance : fortification, construction de canonnières, milices… sans commettre d’erreur dans sa défense, ce qui pourrait amener une des bannières aux portes du palais du Gouverneur. Car les tables peuvent être impitoyables. Si j’ai craint – à tort – le hasard des cartes évènements, ou même  des cartes bannières, les jets de dé m’ont paru très punitifs : il y a dans ce jeu un aspect « lutte contre la marée »  qui peut être lassant, surtout quand la digue lâche…

Défense d’un fort puis activation de la bannière noire

Le Lion de Khartoum est un wargame court et la règle de 13 pages est extrêmement claire avec des exemples limpides. Le playbook en est quasiment inutile. Jacques Rabier propose sur le site de l’éditeur une règle en français, d’excellente qualité, avec ses tables de résultats traduites.

Des colonnes qui vous assiègent : c’est aussi le principe de Pandémie Chute de Rome ou de Levée en masse (VPG, les jeux du Griffon) notamment. Ma première partie avait le plaisir de la découverte. Pour ma seconde, j’avais ajouté  deux règles optionnelles : Gordon Pacha sur le champ de bataille et la valeur incertaine des milices : les milices de civils, imprévisibles, peuvent vous apporter malus, bonus ou rien du tout. En dépit de ces rajouts le plaisir fût moindre. Pour ma troisième partie, je jouais le « Game supplement » de l’auteur, un petit scénario en 5 tours, avec 2 cartes événements intervenant obligatoirement aux tours 9 et 12 (dernier tour). Ce scénario me prit moins de 45 minutes (tri des cartes événements, cartes bannières et mise en place inclus) mais j’ai tenu bon dans le Palais du Gouverneur…

La carte du jeu est agréable,  les pions (en bois) plutôt jolis. Le choix a été fait de cartes en fibre de bois d’un millimètre d’épaisseur et donc peu maniables. Concernant toujours les cartes, leur impression est disons… hasardeuse : une seule carte très mal imprimée mais des dos de cartes qui permettent d’en reconnaître certaines. Le plus triste est que j’ai dû laisser la boîte ouverte avec son matériel plusieurs semaines dans mon garage, pour que s’atténue enfin, l’horrible odeur chimique qui s’en dégageait. Les forums indiquent que d’autres acheteurs ont fait la même expérience, avec séjour obligatoire dans le garage !

Carte des ressources et différents pions  et marqueurs

En conclusion, il s’agit d’un très bon petit wargame , avec les pas (steps) joliment représentés par des silhouettes, et différents facteurs de force des unités : raid/sortie/défense avec les trois tables de combats (ou de résultats) correspondantes.  Pour autant, je ne pense pas y revenir très souvent. 

Raid mené par Ali sur la bannière rouge avec le soutien d’une canonnière

Mais si je devais un jour montrer à une personne parfaitement néophyte comment se joue un wargame, Le Lion de Karthoum serait le premier sorti. Et je tenterais alors certainement un mode coopératif pour lequel ce jeu paraît parfait.

Christian

vendredi 6 novembre 2020

Caesar : Rome vs Gaul, dans la boîte


Je suis plutôt aigri par cette arrivée, avec une conséquence simple : ce sera mon tout dernier achat chez GMT Games (je n'ai pas dit mon dernier jeu GMT). A l'annonce du P500 à l'époque (ça date!), j'avais soutenu le P500 assez naturellement, chose que je ne faisais plus car les frais de port étaient devenus désavantageux, à l'annonce de l'envoi du jeu d'Angleterre et donc, à bien moindre coût. Je ne vous cacherai donc pas mon aigreur car 1/ je n'ai pas été alerté du prix total de la commande avant paiement et 2/ payer $55 de frais de port pour un jeu à $44, ça ne le fait pas ! Je sais que GMT a prévu pour l'année prochaine d'améliorer cette situation mais pour moi le mal est fait, c'est terminé. A noter également l'absence de réponses de leur part à mes messages. Donc oui vous pourrez rire en voyant le contenu de ce jeu, payé 82€ (j'ai mal rien que de l'écrire !).

Voilà. Ça, c'est dit.

Je vous propose tout de même une ouverture de boîte avec mes commentaires, car le jeu, lui, n'y est pour rien !

Je ne l'aurais pas représenté comme ça ce bon César, mais ce n'est vraiment pas la couverture de jeu la plus loupée de GMT ces derniers temps ! Comprenez par là qu'il n'est pas en tshirt SPQR et que c'est dessiné par un adulte qui semble être un artiste digne de ce nom.

Au fond de la boîte les cartes au format tarot, accompagnées de leurs sleeves. Elles sont plutôt jolies et aérées (heureusement vu la taille), c'est chouette. Certains pourront trouver "cool" de voir le jeu livré avec les sleeves (en même temps à ce prix il peut grrr) mais finalement je trouve ça totalement uncool. Coller des centaines de milliers de feuilles plastiques dans tous les jeux est stupide. Surtout à une époque où l'on s'engage de plus en plus (et certains éditeurs y vont vraiment) pour réduire le bilan écologique de notre hobby, je trouve ça tout à fait déplacé. Et tout le monde ne sleeve pas ses jeux, surtout, me semble-t-il, chez les wargamers. Rien n'empêche chacun de s'en acheter mais les imposer de la sorte est très déplacé à mes yeux.

Bon bah voilà. Ca fait quoi? 30? 40 ans? Les mêmes pions... encore et encore...ad nauseum. Vu le reste de la production et le peu de pions, déçu aussi de ne pas avoir des pions à la No Retreat...

Les fameuses francisques gauloises (looooooool). Non GMT. Non. Tu n'as pas le droit (je vais te tutoyer tiens parce que tu m'énerves) de faire ça ! Je ne m'étends même pas sur le sujet tellement c'est stupide et inculte.

Le rendu global est chouette. Je ne suis pas spécialiste sur les noms des lieux et des peuples indiqués mais bon vu les pions...

Très joli, non vraiment, visuellement c'est agréable.

Un beau livret de règles. Je prie (ça ne m'arrive que devant les jeux de GMT...) pour que je ne sois pas obligé de réimprimer les vraies règles la semaine prochaine car c'est quand même bien plus agréable à lire de cette façon (mais, ok, je ne rêve pas... mais c'est du Simonitch... allé on verra !)

Les deux aides de jeu.
 
Voilà. Alors oui je suis assez remonté par ma mésaventure avec ce P500 mais ça reste quand même globalement un beau jeu si on passe sur les erreurs d'école primaire (des francisques putain, des francisques !!!)

Plus qu'à espérer que le jeu soit bon, ce serait la moindre des choses... en plein confinement ça fait plaisir. On en reparle entre la 2e et la 3e vague sur un coup de chance :-)

Arnaud

mardi 27 octobre 2020

1942 USS Yorktown : 30 minutes de vol


 Ce n'est jamais sans émotion que je peux faire une nouvelle entrée dans les pages de dimicatio. Je remercie mes camarades rennais qui ont eu la gentillesse de m'adresser leurs articles dont voici le premier, rédigé par David. J'ai toujours voulu faire de ces pages un espace collaboratif, je me réjouis donc de ces nouvelles entrées qui vont pouvoir enrichir le contenu du blog. Et je compte bien en profiter pour de nouveau tenter de trouver le temps de m'y remettre aussi. Je vous laisse avec David !

Arnaud

Tel un pilote de Dauntless à la recherche du Shoho, une bonne surprise arrive parfois lorsque votre regard se perd dans les étals de votre boutique. La couverture de 1942 USS Yorktown vous interpelle et fait partie de ces jeux à la présence inattendue, dont on se dit : "tiens ?! Et pourquoi pas".
Pour le prix de deux paquets de Philipp Morris, vous piloterez un SBD Dauntless durant la bataille de la mer de Corail en mai 1942 avec pour mission de traquer le porte- avions japonais Shoho et tenter de lui porter un coup de fatal en évitant que votre adversaire en fasse de même sur le Yorktown.
Votre objectif accomplit, vous serez auréolés de gloire et rejoindrez le légendaire Doolittle et autres Papy Boyington. 

1942 relate la traque et la destruction du Shoho par les pilotes de l'US Navy mais n'est cependant ni une simulation de vol ni un précis de combats aériens. Toutefois, les faits et les actions constituant cet engagement lors de la bataille de la mer de Corail sont plutôt bien retranscrits. Pour couler le Shoho il est nécessaire de requérir de 1 à 4 aviateurs pour cette mission de haut vol en temps réel (30 minutes en difficulté moyenne).

Cet indicateur temporel montre la pression s’exerçant sur les pilotes qui ne doivent pas chômer et ont un impératif d'optimiser toutes leurs actions. La prise en compte de la gestion du temps doit être en adéquation avec le tempo de vos actions ainsi que la maîtrise de votre sang froid soumis à rude épreuve ; ce dernier paramètre constitue un atout ou un handicap au fur et à mesure que les aiguilles de l'horloge défileront."

Le tour de jeu démarre par le CV Shoho qui envoie ses avions à votre recherche : des Kate pour mieux vous bombarder, des Jake pour mieux vous repérer, des Zeke pour mieux vous abattre en combat tournoyant. L'IA japonaise tire 2 cartes précisant une île avec des avions ennemis à placer et dès qu'une ligne continue est tracée entre le Shoho et le Yorktown, chaque carte avec un « hit » de dessiné inflige un dommage. Au bout de 3 dégâts, pas de concession : bye bye le Yorktown.

Le jeu se termine par une victoire si vous coulez le Shoho en le frappant avec 3 coups décisifs. Néanmoins, la partie est perdue lorsque le Yorktown sombre par 3 dégâts, ou si le temps imparti est écoulé ou bien encore, si les avions de l'US navy sont tous abattus.

 

Sur la photo ci-dessus, on distingue la carte principale avec les différentes lignes séparant les deux
protagonistes avec leur chapelet d’îles. Le Dauntless en 3 cartes avec sa réserve de carburant et
l’expérience cumulée du pilote. Les 5 cartes actions où chaque pilote place son jeton d'action. On
peu noter que le pont d'embarquement possède une capacité d'accueil de deux avions seulement en
atterrissage/décollage.
 Chaque joueur dispose d'une action à accomplir chaque tour parmi les 5 suivantes :

Recherche : mon avion est sur une île censée être adjacente à l'ennemi et je tente de détecter le Shoho et sa couverture anti-aérienne qui le protège.
Décollage : je prends mon envol depuis le pont en décidant d'utiliser plus ou moins de carburant afin d'aller plus ou moins loin. Si le Shoho est repéré, je peux décider d'embarquer une torpille « From Pearl Harbor with love » mais celle-ci alourdit mon avion et gêne mes actions en me soutirant un dé.
Atterrissage : si j'ai assez de carburant, j’atterris sans encombre et je fais le plein avant de repartir au combat. Si je manque de carburant, je passe un test de manœuvre qui s'il réussit, me permet un atterrissage impeccable. S'il est raté, mon zinc est endommagé avec un risque de me blesser, ce qui a terme engendre la destruction de ma monture si cela devait arriver une seconde fois et une perte d’expérience du pilote à chaque échec (l'aviateur est susceptible ; sa confiance entamée, il est froissable comme la tôle de son appareil).
Attaque : une des actions principales du jeu afin de nettoyer les cieux de la présence des Japonais, frapper la chasse anti-aérienne du Shoho, ou bien larguer une torpille sur la barcasse nippone.
Mouvement : je peux me déplacer de façon pépère d’île en île en dépensant 1 carburant ou je pousse les gaz avec 3 carburants pour bouger de 2 îles. Chaque fin de mouvement aboutissant à une rencontre, pas forcément "Meetic" avec mon adversaire, me donne une possibilité d'attaque sans bonus.

Chaque action nécessite un certain nombre de lancers de dés avec un certain nombre de succès à atteindre en fonction de la difficulté de la tâche ou de l'ennemi à abattre. Par exemple, il est plus facile de gagner un combat face à un torpilleur Kate mais la chose est moins aisée face aux coriaces Zeke. La contrepartie lorsque vous réussissez vos actions d'attaque et de recherche, est que vous engrangez de l’expérience, débloquant des dés supplémentaires pour résoudre de futures actions.
1942 propose un défi de taille aux joueurs parce qu’en une demi-heure top chrono, les actions des 4 chasseurs seront à optimiser sans temps mort entre la recherche du porte-avions ennemi, la destruction de sa couverture aérienne, la destruction dudit porte-aéronefs ainsi que des avions ennemis cherchant à couler votre bâtiment. Il faut multiplier les allers et retours car les temps de trajet, les attaques, etc. brûlent du carburant et les fréquents appontages peuvent constituer une source de dommages pour les pilotes et leurs machines. Les joueurs doivent coopérer et se repartir les tâches afin d'atteindre leur but.

Au départ , une équipe se charge de repérer le Shoho le plus rapidement possible en esquivant les patrouilles ennemis pendant que l'autre équipe fait écran aux appareils nippons. Une noria d'hélices emplit ainsi les cieux de la mer de Corail. Une fois le Shoho détecté, les Dauntless s'alourdissent de torpilles en croisant les doigts pour un coup au but car les occasions de faire mouche seront rares.
Pendant ce temps, leurs camarades maintiennent les patrouilles afin d'endiguer les tentatives nippones de couler le Yorktown. Dans les 2 camps, chasseurs et gibiers coexistent, se croisent et se livrent à un face à face tendu où la moindre erreur se paie cash. Si l'Histoire est respectée, le Shoho est détruit le 7 mai 1942 par les avions américains.

Ce petit jeu est idéal lorsqu'on dispose de 30 minutes pour combler un temps mort entre deux parties lors d'une convention ou pour boucler une soirée.

Malgré la simplicité de son mécanisme, 1942 est un sacré challenge à relever. Les tours s’enchaînent rapidement avec les yeux rivés sur l'horloge et plus les minutes défilent plus l'angoisse monte et le choix de chaque action devient déterminant, le jet de chaque dé, capital. L'IA japonaise s'acharne dans sa défense comme dans ses attaques et si les joueurs ne se coordonnent pas, c'est l'échec assuré. Pour le moment, sur 3 parties jouée : 3 échecs... Échec dû notamment au manque de temps et c'est sur ce point que tout se joue. Les joueurs peuvent se brieffer avant de lancer le chrono dans le but d'établir un plan d'attaque et même s'il est toujours possible de communiquer durant la partie sur le « qui fait quoi » ou réajuster le plan de bataille, l'horloge tourne sans possibilité de pause. Les Nippons eux, de leur côtés sont parés et décidés à vous torpiller sans escale.

David


lundi 30 décembre 2019

10 ans, 20 jeux




Plutôt que de jeter un regard sur une année seulement, je préfère aller plus loin et passer en revue ces jeux qui m'ont marqué pendant la décennie passée. Les années 2010 ont-elles été de belles années pour le joueur historique que j'essaie encore d'être ?

JULIUS CAESAR de Grant Dalgliesh et Justin Thompson (2010) chez Columbia Games.
J'ai du mal avec les wargames à bloc. Reste ce Julius qui squatte depuis déjà 10 ans mon top des jeux avec cette mécanique. Il m'en reste beaucoup à essayer mais comme je n'accroche que difficilement j'avoue un peu me contenter de celui-ci, vraiment abouti de mon point de vue.

SPHACTERIE 425 AV. JC de Frédéric Bey (2010) chez Vae Victis.
Excellente surprise, un jeu fun et dynamique (en plus d'être vraiment pourvu de pions magnifiques). Ca n'invente rien et recycle même pas mal le système "à la Miranda" mais une gageure en considération d'un thème et d'une situation des plus originales.

A FEW ACRES OF SNOW de Martin Wallace (2011) chez Treefrog Games.
Un jeu majeur pour ma part. Quand la mécanique du deckbuilding rencontre le jeu historique sur un plateau de jeu. Une perle rare, qui aura inspiré mais n'aura jamais été égalée. J'adore.

NO RETREAT! THE RUSSIAN FRONT de Carl Paradis (2011) chez GMT Games.
Pour moi un wargame assez inclassable : peu de pions pour un front immense, des parties longues malgré tout et un faux amis : souvent considéré comme un wargame "introductif", considération que je ne partage absolument pas tant les règles sont confuses et difficiles à prendre en main, qui plus est avec de très nombreux concepts originaux. Je trouve un excellent jeu, bien plus exigeant (et punitif) qu'il n'y parait.

FIGHTING FORMATIONS de Chad Jensen (2011) chez GMT Games.
Une sélection particulière car je n'ai pas vraiment accroché à ce jeu mais qui y figure pour deux raisons : son idée de base que je trouvais excellente, utiliser des dés aux nombres de faces variées selon les situations, et son auteur. Faire une sélection de la décennie sans Chad Jensen m'aurait paru injuste. La plus grande perte du monde ludique de la décennie.

WIR SIND DAS VOLK! de Richard Sivél et Peer Silvester (2014) chez Histogames.
Pas du tout un wargame mais un jeu très exigeant pour simuler une situation historique à travers des mécaniques de placements/gestion/optimisation qui m'avaient autant épatées que données mal à la tête ! Un jeu qui mérite vraiment le détour pour ceux qui accrochent à ce type de jeux à multimécaniques très très riche.


W1815 de Hannu Uusitalo (2015) chez U&P Games.
Un design frais et léger pour ce petit jeu qui arrive à transformer une simple mécanique de dés en jeu historique (on ne va pas dire simulation bien entendu). Une innovation qui aura ouvert la voix à d’autres jeux de ce type minimaliste et fun.

CHURCHILL de Mark Herman (2015) chez GMT Games.
Là on est sur du lourd. Je trouve le jeu visuellement atroce mais quel design brillant ! Un rare jeu exclusivement à trois, avec des mécaniques originales et un ensemble, un rendu et une tension en cours de partie tout à fait exceptionnels. Reste des durées de parties et un niveau de jeu un peu rédhibitoires pour pas mal de joueurs.


TRIUMPH & TRAGEDY de Craig Besinque (2015) chez GMT Games.
Un avis en deux teintes sur celui-ci mais je pense qu'il a bien sa place ici. J'ai adoré la partie préparatoire du conflit jusqu'au déclenchement de la guerre, original et très fun où chaque camp cherche à tirer à lui les bonnes faveurs des autres pays, tout en préparant son industrie et sa population au choc militaire à venir. La partie plus "wargame" est je trouve par contre plutôt convenue et sans surprise.

INVADERS FROM DIMENSION X! de Hermann Luttmann (2015) chez Tiny Batlle Publishing.
Que voilà un bel OBNI ! Un jeu solo totalement chaotique dans un univers sciencefictionnel classique (comprendre très pulp). Deux cartes et deux scénarii voient s'affronter les forces humaines contre les horribles envahisseurs de la dimension X. Souvent ennuyeux à cause d'IA souvent bancales ou lourdingues là les activations par jetons sont totalement chaotiques, c'est au joueur de réagir au mieux grâce au panel d'unités dont il dispose. Certainement mon wargame solo léger préféré.


Quartermaster Général 1914 & Victory or Death de Ian Brody chez PSC Games.
Un doublé de la même écurie la même année. Je n'avais vraiment pas aimé la version seconde guerre mondiale que j'avais trouvé farfelue et inintéressante. Bien m'aura pris d'essayer sa version première guerre mondiale qui ajoute des mécaniques qui obligent les joueurs à anticiper les tours suivants, pour un résultat bien plus juste et intéressant. J'ai également beaucoup aimé la version guerre du Péloponnèse qui propose de très larges ajustements de règles pour simuler avec beaucoup de justesse le rendu de ce conflit avec peu de règles.

RACE TO BERLIN de Krzysztof Dytczak (2015) chez Leonardo Games.
Un "warteau" comme je les aime: intéressant, original et graphiquement très sympa. Chaque joueur joue les deux camps sur les deux fronts différents, un en attaque (russe ou américain) et un en défense (allemand). J'aime beaucoup les unités cachées, le système de points d'activation, la gestion de la longueur des fronts. Un jeu injustement méconnu !

DAYS OF IRE : BUDAPEST 1956 de Katalin Nimmerfroh, Dávid Turczi et Mihály Vincze (2016) chez Cloud Island.
Voilà un excellent jeu de plateau qui propose de découvrir (parce qui connaissait vraiment ?) un conflit obscur dans nos contrées. Un jeu extrêmement riche qui propose trois modes de jeu, tous réussis et intéressants : coopératif, un contre tous (un joueur russe vs les insurgés) ou solo. Chaque mode se joue différemment du côté russe. Un mélange entre Twilight Struggle d'un côté et les jeux "à la pandémie" de l'autre. Une totale réussite.

FAR EAST WAR de Allen Wang (2016) chez Imjin Creative.
Un jeu totalement passé sous les radars, à tort selon moi. Un thème et un traitement original pour un wargame aux composants magnifiques. J'aime vraiment la mécanique d'activation par une roue d'actions qui déclenche des événements et le système de combat très original. Ce que Kickstarter permet vraiment : sans financement participatif ce jeu n'aurait pas existé.

13 DAYS : THE CUBAN MISSILE CRISIS DE Asger Harding Granerud et Daniel Skjold Pedersen (2016) chez Ultra PRO.
Autre petite pépite avec ce Twilight Struggle léger et rapide sur un thème rare. J'aime vraiment son format, sa durée de parties et sa profondeur de jeu.

 BLACK ORCHESTRA de Philip duBarry (2016) chez Game Salute.
Là on s'éloigne totalement du wargame avec ce jeu de plateau coopératif où les joueurs vont devoir unir leurs forces afin de trouver un moyen pour assassiner Hitler. Les mécanismes de jeu sont simples et efficaces mais je reste assez épaté de voir ce jeu sur ce thème et avec ce traitement graphique (magnifique au demeurant) avoir vu le jour. Un très bon jeu de plateau historique, très difficile à gagner.

THE EXPANSE : THE BOARDGAME de Geoff Engelstein (2017) chez WizKids.
Quand on est fan de la série et qu'en plus on lit au détour d'un blog qu'il s'agit du jeu multijoueur préféré de Mark Herman, on ne peut que se ruer dessus. Le fan de la série risque d'être déçu (production WizKids donc dégueulasse) par contre l'amateur de jeu à la Twilight Struggle, qui plus est à plusieurs lui ne le sera pas. Un excellent jeu. A noter que l'extension sortie ensuite apporte du mieux pour implémenter la série.

GKR : HEAVY HITTERS de Matt Hyra (2018) chez Weta Workshop.
Autre jeu de science-fiction mais autre trip. Je me suis dit que j'allais quand même mettre un jeu de figurines dans cette liste et ce ne pouvait pas en être un autre ! Produit par le firme d'effets spéciaux créée par Peter Jackson, ce jeu propose les plus beaux mécas pré-peints du monde ludique ! Le jeu est en plus très sympa : on peut customiser les trois armes de son Heavy Hitter en début de partie grâce à une mécanique de deckbuilding et les parties sont tactiques et funs. Mon plus gros craquage sur Kickstarter jusque là ! 

UNDAUNTED : NORMANDY de Trevor Benjamin et David Thompson (2019) chez Osprey Games.
Dernier jeu de cette (longue) liste de ce qui compose mon "best of" des années 2010. Peut-être le futur du wargame ? C'est léger (peut-être un peu trop par moment pour un wargamer), rapide, simple mais passionnant et hyper tendu. Comme les situations sont très tactiques les scénarii sont variés et font la place à l’héroïsme. J'ai été tout à fait bluffé par l'intégration d'une forme maitrisée de deckbuilding à un jeu d'affrontement pur. Cela me rappelle ma découverte de A Few Acres of Snow. Le jeu qui m'a enthousismé dernièrement.


Je dois forcément être passé à côté de tout un tas d'autres perles, faute de temps pour jouer suffisamment ces dernières années. Je vois quand même dans cette liste de quoi déjà passer de nombreuses heures de plaisir. Finalement une belle décennie, qui aura vu de nombreux titres essayer de renouveler le jeu d'histoire au sens large avec une direction prise vers des jeux plus rapides et nerveux que nos bons vieux wargames classiques. 

Je vous souhaite avec quelques heures d'avance une belle année 2020, en espérant vous retrouver ici de temps à autres... ou encore mieux, autour d'une table de jeu !

Arnaud

vendredi 20 décembre 2019

Comencheria, l'Empire Comanche en solo


Incroyable mais vrai ! Grâce à Christophe, chantre du jeu en solitaire, qui nous propose un avis détaillé sur l'un de ses derniers coups de cœur, nous allons clôturer cette année par une publication ! Merci à lui et j'en profite pour vous souhaitez de belles fêtes de fin d'année, pleines de jeux et de bonnes choses.
Arnaud

Comancheria : The Rise and Fall of the Comanche Empire. 

Sorti en 2016 chez GMT Games, Comancheria est le second jeu dans la série de jeux en solo First Nations de Joel Toppen. A travers 4 scénarios historiques, le joueur va diriger la nation Comanche de son arrivée dans les Plaines du sud à son déclin sous les assauts culturels et militaires des puissances coloniales. Les 4 scénarios joués en campagne vont dérouler 175 ans d’histoire pendant lesquelles le joueur va combattre les tribus hostiles des Utes ou des Apaches pour établir son empire, développer un réseau de commerce avec les puissances coloniales et des tribus amicales et se défendre contre l’avancée des puissances coloniales venues du sud, de l’est et de l’ouest.

(la situation de départ en 1700, scénario 1)


Chaque scénario représente une période de 50 années pendant laquelle le joueur pourra effectuer des « opérations » afin d’atteindre ses objectifs (de croissance dans les deux premiers scénarios, de défense dans les deux derniers).  
La partie commence en 1700. Le joueur possède une Rancheria (campement) avec trois groupes de guerriers, un chef de guerre (Mahimiama), un chef civil (Paraibo) et quatre groupes de chevaux. 
Sa puissance militaire ainsi que sa présence culturelle est notée sur une piste à gauche du plateau de jeu. Si jamais la Culture et le Militaire se retrouve à zéro à n’importe quel moment du jeu, c’est la défaite immédiate. 

Chaque tour de jeu est découpé en 4 phases, elles-mêmes divisées en étapes.
  1. 1 - La phase de Guerre
Si une (ou plusieurs) armée ennemie est présente sur le plateau c’est le moment où elle va avancer vers vos Rancherias et éventuellement attaquer. Cette phase est dirigée par le tirage de deux cartes du paquet WAR. La première carte va déterminer quelle(s) armée(s) va se déplacer et la seconde un événement lié aux armées en jeu (renforts, attrition, maladie, embuscade, etc.) Si pendant cette phase, les armées ennemies atteignent vos Rancherias ou vos bandes de guerriers, c’est le combat.  
La procédure de combat est simple et représente les tactiques indiennes de vagues d’attaque et l’attrition de ce genre de combat. 

  1. 2 - La phase de sélection d’Opération
Dans la plupart des cas, le joueur pourra choisir ce qu’il veut faire parmi les options suivantes : 
  1. A - Opération d’actions avec ses groupes de guerriers 
  1. B - Opération de Culture 
  1. C - Opération de Planning 
  1. D - Opération de Passage du Temps 
Mais à certains moments du jeu l’Opération de Passage du Temps sera obligatoire. 

  1. 3 - La Phase d’exécution de l’Opération choisie
  1. A - Actions : le joueur va sélectionner une de ses Rancherias et effectuer des actions avec les groupes de guerriers présents dans ce campement, chaque action coutant des Points de Mouvement. Il pourra aussi dépenser des points d’actions pour activer n’importe quel groupe de guerriers en jeu, même s'il appartient à une autre Rancheria. 
Le joueur peut Déplacer ses guerriers sur la carte, Chasser des Bisons (pour gagner de la nourriture), effectuer un Raid sur une tribu indienne ou un village colonial (pour capturer des chevaux ou des prisonniers) ou Négocier avec une tribu amie ou une puissance coloniale avec laquelle le joueur est en paix (échanger des prisonniers, bisons, chevaux contre de la nourriture, des bibelots ou même des armes). 
Chaque groupe de guerriers peut effectuer autant d’actions qu’il peut/veut durant cette phase dans la limite de ses points de mouvements (plus un groupe sera puissant moins il sera mobile).  
A noter qu’il est donc tout à fait possible dans la même phase pour un groupe de faire du commerce avec un campement avant d’effectuer un raid dans le même campement (tactique historiquement correcte). 
Le résultat d’un raid est lié à la pioche d’un ou plusieurs pions qui peut soit donner des « succès », soit des points d’action pour « l’ennemi ». 
  1. B - Culture : avec cette opération le joueur va augmenter la puissance culturelle de la Nation Comanche sur les plaines (1 Rancheria = 1 point de culture, plus 1 point par région contrôlée). 
  1. C - Planning : cette opération va permettre d’augmenter la puissance de ses chefs de guerre et civil. Le joueur pourra aussi déplacer ses Rancherias sur la carte, gagner des points d’actions, convertir sa présence culturelle en puissance militaire, etc. 
  1. D - Passage du Temps : c’est pendant cette phase que le joueur va pouvoir développer son Empire. Le Joueur pourra dépenser de la nourriture pour créer de nouveaux groupes de guerriers et/ou pour renforcer les groupes existants. Si un groupe est isolé sur la carte, c’est à ce moment qu’il peut créer une nouvelle Rancheria. Les Mahimiamas peuvent devenir des Paraibos (en conservant leur puissance), des chefs vont mourir et d’autres vont prendre leur place. 
Les tribus ennemies et les campements coloniaux qui ont été attaqués précédemment vont disparaître, les alliances et les traités de paix peuvent être annulés. Des nouveaux troupeaux de bisons vont apparaître, et des événements historiques vont se produire. 
Le joueur pourra aussi se développer en apprenant de nouvelles techniques sur différents axes : Tactiques, Négoce, Guerre, Diplomatie, etc. 

Une fois qu’un certain nombre de Passage du Temps ont été effectué, la possibilité d’une vérification des conditions de Victoire devient de plus en plus probable à la fin de cette phase.


                 4 - La Phase de Nettoyage.

Après quelques activités de maintenance (vérification de l'empilement, etc.) c’est le moment le plus crucial du jeu : l’activation des ennemis.  
Le joueur va piocher un pion dans la pioche des succès. Si c’est un succès il retourne dans la pioche, si c’est un pion de Points d’Action, il va dans la réserve de « l’ennemi ».
 
(le display d’activation des ennemis et la carte historique qui définissent les conditions de victoire mais aussi la probabilité qu’un ennemi s’active)
Le joueur va lancer 1D6 et vérifier sur la carte historique quel ennemi s’active. Puis il lance une nouvelle fois 1D6 et va retourner le pion de la ligne correspondante de l’ennemi activé. 
Puis le joueur va dépenser les points d’actions disponibles pour effectuer les actions de haut en bas (le cout en PA est noté sur le pion). Une fois l’action effectué le pion est déplacé, sur la même ligne, dans la colonne la plus à droite. Une fois qu’il n’y a plus de PA disponible, tous les pions de la colonne de l’ennemi montent et les pions de la colonne de droite retournent (de bas en haut) dans leur colonne.

(Après 2 actions de culture, il reste 4 PA pour que l’Espagnol au Sud entre en guerre. Malheureusement pour lui, j’avais déjà perdu la partie)
Les différentes actions que l’ennemi peut faire sont différentes en fonction de son origine et de la période historique. Par exemple les Espagnols et les Mexicains ne chassent pas les bisons mais les Texans et Américains oui. 
Les puissances coloniales peuvent : signer un traité de paix, entrer en guerre (et envoyer des armées), subjuguer (détruire) des tribus indiennes, établir des villes ou attaquer notre culture. 
Les tribus indiennes du nord peuvent venir chasser le bison, effectuer des raids sur nos Rancherias, entrer en guerre ou établir des villages.

(L’Empire Comanche en 1800, scénario 3)

  1. 1/ Nombre de joueurs : 1. Comancheria est un jeu purement solitaire 
  1. 2/ Interactivité : aucune voir 1  
  1. 3/ Re-jouabilité : excellente. Même si les débuts de campagne seront relativement similaires, chaque décision prise pourra avoir un impact lors des scénarios suivants. Si la mission 1 est assez facile à gagner, il est aussi très facile de se mettre dans une position difficile dans la mission 2. 
  1. 4/ Matériel : le plateau est somptueux. Les cartes, comme presque toujours chez GMT, sont d’excellentes qualité (je ne les sleeve pas c’est pour dire).  
  1. 5/ Originalité des mécanismes : L’IA du jeu est une des meilleures que je connaisse. Elle est directement liée à nos actions. Plus le joueur fera de choses, plus l’ennemi pourra agir. Comme avec un véritable adversaire, les coups possibles sont prévisibles mais il y a une incertitude sur ce qui va vraiment arriver. 
  1. 6/ Pour quel type de joueur : les joueurs ayant un intérêt pour cette période historique, les joueurs solos qui cherchent une IA qui va leur donner du fil à retordre. A noter que la difficulté de prise en main sera variable en fonction des joueurs : pas de soucis pour un wargamer car les règles sont claires et bien écrites, par contre, pour un pousseur de cube en bois c’est rentrer dans un nouvel univers et la difficulté sera plus importante.
       7/ Note : 10/10