mercredi 25 mai 2011

Labyrinth (GMT), un jeu terrifiquement bon (CDG Serie #5)



Sous la loupe aujourd'hui, Labyrinth (GMT) : the war on terror. Cette critique s'insère dans ma série dédiée aux card driven games. A titre liminaire, disons que Labyrinth est typiquement le genre de jeu qui connaît ses adeptes et ses détracteurs. Ce constat est à l'image du thème du jeu : la lutte manichéenne entre deux conceptions opposées du monde. C'est blanc ou c'est noir. Fort de ces quelques considérations pseudo-psychologiques bien matinales, voici mon opinion sur ce jeu.

Jouabilité, mécanismes et plaisir ludique (51/ 60). Comme dans chaque jeu piloté par des cartes, les joueurs peuvent choisir de les utiliser en tant qu'événement ou pour leur valeur en points d'opérations.

La stratégie pour les deux camps, états-unien et djihadiste, est différente. Cette asymétrie se reflète dans les règles, tant au niveau des conditions de victoire que des opérations dont ils disposent. Sans entrer dans les détails, le joueur US devra tenter de ramener les pays musulmans dans 'l'axe du bien' tout en conservant un niveau de prestige élevé sur la scène politique internationale. Pour ce faire, il pourra étendre son influence idéologique, démanteler les cellules terroristes et intervenir militairement là où nécessaire. Quant au Djihadiste, il aura pour but de mettre une grande partie des pays musulmans sous la loi des intégristes ou, plus prosaïquement, de faire exploser une bombe sale à San Francisco. Les opérations dont il pourra user pour ce faire consistent à recruter des cellules, mener des Djihads et déposer des bombes.

Grande particularité du jeu, chaque joueur joue deux cartes consécutives sur des mains variants entre 7 et 9 cartes . Par ce biais, le jeu gagne en profondeur tout en restant parfaitement cohérent à l'usage. Pas de méga-hyper-combos qui cassent tout, mais plutôt la possibilité d'appuyer certaines opérations.

Bien que le mécanisme de ce jeu offre une grande rejouabilité, la répétition des opérations peut amener une légère lassitude. J'impute cela au manque de véritables manoeuvres (en terme de mouvements ou de combats au sens usuel du terme) qui manquent quelque peu. C'est le défaut d'un tel mécanisme, aussi génial soit-il, qui fait preuve d'une énorme abstraction. Ajouter cela au fait que chaque joueur peut jouer deux cartes consécutives, cela en rebutera quelques un à coup sûr, tant les tenants et aboutissants peuvent leur paraître peu clairs (-8 points). Ce fut le cas pour mon comparse Arnaud (retrouvez sa critique du jeu ici).

Autres griefs, il y a parfois un petit côté 'coin flip', surtout lorsqu'on joue le djihadiste. Suivant la tournure des événements, c'est énervant (-1 point).

Clarté des règles et accessibilité (12/ 15). Si les règles tiennent en dix pages, cela ne signifie pas pour autant que le jeu est simple vous l'aurez compris. A ce niveau, il y a sans aucun doute une source de confusion dont il faut se prévenir. La mise en pratique efficace de tous les concepts développés demande quelques parties d'apprentissage. Au début, il n'est pas aisé de savoir quoi faire et de ne pas oublier certains détails cruciaux, comme la façon de ne pas perdre (qui l'eut cru). Heureusement, les livrets de règles et de jeu sont un modèle du genre. Ils contiennent notamment un exemple de partie claire et détaillé et un récapitulatif de 'comment que je fais quoi', ce qui sauve la note.

Composants (10/ 10). Somptueux. Carte en dur, pions en bois, cartes à jouer illustrées en couleur, livrets en couleur, le tout servi dans une boîte au format "deluxe". Pour le joueur de wargame, c'est la panacée.



Rendu historique (8/ 10). Dans mon exemplaire, GMT a oublié de me fournir les événements : "Révolution du Jamsin", "Exclusion aérienne en Lybie" et "Mort de Ben Laden". Très de plaisanteries même s'il y a impossibilité teutologique à mettre un 10 pour ce poste. Néanmoins, le fait que l'auteur a fourni une explication 'historique' pour chaque carte mérite l'octroi d'une bonne note.

Originalité et Coup de coeur (5/ 5). J'ai adhéré, j'ai adoré. Le thème n'a jamais été traité dans un wargame à ma connaissance. Là où je tire mon chapeau à l'auteur, Volko Ruhnke, c'est qu'il a su se démarquer de Twilight Struggle (que j'apprécie au demeurant), réussissant à créer un jeu véritablement novateur.

Conclusion (86/ 100, note BGG 8.6). Labyrinth est un jeu très immersif pour qui ose s'y essayer. Il s'adresse à des joueurs capables de beaucoup d'abstraction, ce qui en fait un  mauvais jeu pour l'initiation selon moi. Cela étant dit, allez-y c'est du tout bon.

Justin

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Un autre avis permettrait d’y voir un peu plus clair ?
Après une 10aine de partie de Labyrinth, voici mon avis :
Adepte des card driven (Paths of glory, Triumph of chaos, TS, Barbarossa to Berlin….), mon avis est plus que positif avec Labyrinth. Certes les mécanismes sont nombreux et difficiles à comprendre lors des 2-3 premières parties (disons que l’on subit ces mécanismes sans savoir vraiment à quoi ils servent…), mais après un peu d’expérience, tout s’éclaire. Ils permettent de simuler assez concrètement les relations internationales et l’image des USA dans leurs « croisade » contre le terrorisme. Et ces 2 critères sont primordiaux si le joueur US veut pouvoir changer les gouverments arabes faibles et neutre en alliés puissant. Imaginez gagner en « attaquant bêtement » les régimes islamiques sans concertation et sans appui de l’Europe est a coup sûr s’enferrer dans des guerres qui risquent d’être longues et couteuses…ce qui fait le jeu des islamistes. Ce dernier, au contraire, devra user d’événements en sa faveur pour allumer des guérillas un peu partout, que le joueur US aura bien du mal a éteindre. Les attentas terroristes peuvent être un bon moyen de casser la dynamique US et de redonner de ressources humaines pour les djihadistes. Et des djihads bien organisés permettront de déstabiliser des régimes et pourquoi pas imposer un régime islamiste. Sur font de guerre civile, d’intervention militaire US, d’attentats, d’évenements compromettant, de relation internationale tendue…Labyrinth réussit son pari: nous plonger dans la politique US au Moyen-orient.
Pour le négatif, il semble que le rôle jihadiste soit, au final, moins intéressant (attentat, djihad, recrutement…on tourne un peu en rond) et il est probable qu’on se lassera plus vite de ce rôle. D’ailleurs, le jeu en solitaire vous propose seulement de jouer les USA. Par un système un peu compliqué mais assez malin, vous pouvez prendre un réel plaisir à combattre le terrorisme. On pourra ajouter que la chance à un poid (trop ?) important (tirage de carte, dés) et peuvent faire réellement basculer des parties serrées. Enfin, les conditions de victoire sont, à mon avis, à améliorer.
Bref, malgré quelques défauts, Labyrinth est un jeu intéressant et vous demande sang-froid, pragmatisme et prise de décisions difficiles (ce que l’on aime dans les CDS). Le jeu en solitaire est particulièrement réussit. Malgré une note inférieure à Paths of Glory, on oubliera assez vite la première impression négative (thème bancale, mécanismes très nombreux) etprendre à chaque fois un réel plaisir à déclarer la guerre au terrorisme.

Dimicatio a dit…

Merci beaucoup pour ce commentaire constructif! Pour ma part j'ai passé mon tour rapidement mais je comprends tout à fait l'intérêt que les fans du jeu y portent.